La réforme des retraites, qui doit entrer en vigueur au 1er septembre 2023, poursuit son chemin avec la publication des deux premiers décrets au journal officiel dimanche 4 juin 2023 (décrets 2023-435 et 2023-436 du 3 juin 2023).
Ces premiers décrets (en application des articles 10 ,11 et 17 de la LFSS pour 2023) traitent en priorité de la question du relèvement de l’âge d’ouverture des droits à la retraite de 62 à 64 ans d’une part, et des dispositifs de départs anticipés d’autre part. Focus.
Départ en retraite : relèvement de l’âge légal à 64 ans
Mesure la plus contestée de la réforme, le premier décret transpose fidèlement ce que prévoit la loi du 14 avril 2023 au regard du report de l’âge légal d’ouverture des droits. Ainsi, l’âge légal de départ à la retraite passera de 62 à 64 ans.
L’âge légal sera progressivement relevé à compter du 1er septembre 2023, à raison de 3 mois par année de naissance afin d’atteindre 64 ans en 2030.
Ce report est couplé à une accélération de l’allongement de la durée de cotisation nécessaire pour obtenir une retraite à taux plein résultant de la loi Touraine de 2014. Autrement dit, dès 2027, il faudra avoir travailler 43 ans pour bénéficier d’une retraite à taux plein.
L’âge de retraite à taux plein, soit l’âge d’annulation de la décote reste fixé à 67 ans.
Départ anticipé carrières longues : 4 bornes d’âge, une clause de sauvegarde
La loi portant réforme sur les retraites qui recule l’âge de départ et augmente la durée de cotisation, articule désormais le dispositif de retraite anticipée « carrière longue » autour de quatre bornes d’âge contre deux sous la législation actuelle.
Ainsi, dès lors que les conditions de durée de début d’activité et de durée d’assurance cotisée et « réputée cotisée » sont remplies, un départ anticipé avant l’âge légal est ouvert aux assurés à partir de :
- 58 ans pour ceux qui ont débuté leur carrière avant 16 ans ;
- 60 ans pour ceux qui ont commencé à travailler entre 16 et 18 ans ;
- 62 ans pour ceux qui ont débuté entre 18 et 20 ans ;
- 63 ans pour les personnes ayant débuté leur activité entre 20 et 21 ans.
En outre, conformément aux nouvelles dispositions de la loi portant réforme des retraites, la durée d’assurance cotisée nécessaire pour bénéficier de ce dispositif est dorénavant réduite à celle exigée pour obtenir le taux plein.
Par ailleurs, le texte apporte des précisions au regard des périodes validées au titre de l’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF) et de l’assurance vieillesse des aidants (AVA) désormais considérées par la réforme comme étant des trimestres réputés cotisés au regard des départ anticipés pour carrière longue. A l’instar, des trimestres de chômage, de maladie ou d’invalidité… ces dites périodes sont limitées à 4 trimestres par le décret du 3 juin 2023.
L’entrée en vigueur de la réforme des retraites étant prévue pour le 1er septembre 2023, le texte introduit enfin, une « clause de sauvegarde » pour les assurés nés entre le 1er septembre 1961 et le 31 décembre 1963 qui répondent aux conditions requises du dispositif carrières longues avant l’entrée en vigueur de loi sur la réforme des retraites. Autrement dit, les personnes éligibles au dispositif qui justifient d’une durée d’assurance cotisée ou réputée cotisée, avant le 1er septembre, pourront donc échapper à la réforme et demander un départ en retraite anticipée au taux plein.
Départ anticipé pour handicap maintenu à 55 ans
Le texte ne remet pas en cause le dispositif de départ à la retraite anticipée et maintient l’âge de départ au plus tôt à 55 ans pour les travailleurs handicapés, abaissant ainsi leur âge légal « jusqu’à 9 ans ».
Ce qu’il faut retenir du décret :
- La suppression de la double condition de durée totale d’assurance et de durée cotisée pour ne retenir que la condition de durée d’assurance cotisée. Celle-ci correspond à une fraction de la durée d’assurance nécessaire à l’obtention du taux maximum de 50 %, et sera désormais fonction de l’année de naissance des assurés.
- L’abaissement à 50 % (contre 80 % actuellement) du taux d’incapacité nécessaire pour réclamer la reconnaissance administrative de leur situation de handicap par la commission d’examen médicale au moment du départ à la retraite, s’ils ne peuvent pas l’attester.
- La réduction de la durée d’assurance cotisée à l’égard des générations nées à compter du 1 er septembre 1961 jusqu’au 31 décembre 1972 afin de compenser la hausse du nombre de trimestres requis pour bénéficier du taux plein.
Les durées d’assurances cotisées requises restent en revanche identiques à celles en vigueur avant la loi portant réforme sur les retraites pour les générations 1973 et suivantes dans la mesure où, la durée d’assurance du taux plein est identique.
Départ anticipé pour incapacité d’origine professionnelle
Concernant l’incapacité professionnelle, la réforme des retraites, qui s’appliquera à compter du 1er septembre 2023, prévoit un âge de départ en retraite anticipée pour incapacité permanente (IP) différencié selon le taux d’IP :
- À partir du 1er septembre 2023, le départ anticipé à 60 ans serait réservé aux assurés justifiant d’un taux d’IP d’au moins 20 ;
- Un départ anticipé à l’âge de 62 ans (soit deux avant l’âge légal) serait toutefois possible pour les assurés justifiant d’un taux d’IP compris entre 10 % et moins 20 %.
Nouveau cas de départ anticipé pour « inaptitude » ou invalidité
En raison du relèvement progressif de l’âge à 64 ans, la réforme introduit un nouveau dispositif de départ anticipé pour les assurés reconnus inaptes au travail, ou justifiant d’une incapacité permanente au moins égale à 50 %.
À compter du 1er septembre 2023, ces derniers peuvent bénéficier d’un départ à taux plein à 62 ans même s’ils ne remplissent pas la condition de durée d’assurance requise.
Demande en annulation de la pension
Enfin, les assurés qui doivent décaler leur départ en retraite en raison de l’entrée en vigueur de la réforme peuvent adresser une demande en annulation de leur pension jusqu’au 31 octobre 2023 et non dans un délai de deux mois après la publication du texte comme l’envisageait le projet de décret.
Contrairement aux autres dispositions du décret, l’article 7 relatif à la demande en annulation de la pension entre en vigueur le lendemain de la publication du décret, soit à compter du 5 juin 2023. Autrement dit, les assurés qui ont demandé leur pension avant le 1er septembre 2023 et dont la retraite prend effet à compter de cette date, peuvent demander l’annulation de leur pension ou de leur demande de pension à compter du 5 juin 2023 jusqu’au 31 octobre 2023.
À NOTER
L’exécutif prévoit la publication de 31 textes d’application (dont 4 arrêtés) avant le 1er septembre 2023 portant notamment sur la prévention de la pénibilité, la revalorisation de la pension minimale… pour permettre l’entrée en vigueur de la loi. Les conseils d’administration des caisses de sécurité sociale concernés seront saisis pour avis préalablement.