Afin d’encourager la reprise économique, la loi relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d’autres mesures urgentes, publiée le 18 juin 2020, prévoit plusieurs mesures impactant le droit social, parmi lesquelles de nouvelles dispositions relatives à l’activité partielle, la possibilité de mettre en place l’intéressement par décision unilatérale dans les entreprises de moins 11 salariés, ainsi que de déroger à certaines règles relatives aux CDD et contrats d’intérim.
1. Activité partielle (chômage partiel)
Le régime de l’activité partielle est une nouvelle fois modifié concernant l’aide de l’État, l’activité partielle de longue durée, la faculté de compléter l’indemnisation des salariés via la monétisation de jours de repos et l’incidence des périodes d’activité partielle sur la prévoyance et la retraite.
a. Modulation de l’aide de l’État (art. 1, I, 1°)
La loi autorise le Gouvernement à adapter les dispositions relatives à l’activité partielle notamment en adaptant les règles aux caractéristiques des entreprises en fonction de l’impact économique de la crise et aux catégories de salariés, notamment des artistes à employeurs multiples.
Cette disposition pourrait servir d’appui à une baisse de l’aide de l’État, selon les modalités suivantes :
- Fixation à 60 % de la rémunération horaire brute de référence (au lieu de 70 %° ; ainsi il subsisterait un reste à la charge pour les employeurs), dans la limite de 4,5 SMIC (inchangé), avec un minimum de 8,03 € (inchangé) ;
- Pour les employeurs faisant partie de certains secteurs plus touchés (qui restent à définir par un texte), maintien de l’aide à 70 % jusqu’en septembre 2020.
-> Le montant de l’indemnité à verser aux salariés ne sera pas modifié (70 %).
Entrée en vigueur : selon la loi, à compter du 1er juin 2020 et pour 6 mois au maximum à compter du terme de l’état d’urgence sanitaire (10 juillet), soit jusqu’au 10 janvier 2021. Selon des annonces récentes, les dates de mise en oeuvre pourraient changer.
b. Institution de l’« activité réduite pour le maintien en emploi » (art.53)
Il est institué un dispositif spécifique d’activité partielle dénommé « activité réduite pour le maintien en emploi » destiné à assurer le maintien dans l’emploi dans les entreprises confrontées à une réduction d’activité durable qui n’est pas de nature à compromettre leur pérennité.
Ce dispositif est ouvert à condition qu’un accord collectif (notamment d’entreprise ou de branche étendu) définisse :
- la durée d’application de l’accord ;
- les activités et les salariés concernés ;
- les réductions de l’horaire de travail pouvant donner lieu à indemnisation à ce titre ;
- les engagements spécifiquement souscrits en contrepartie, notamment pour le maintien de l’emploi.
L’employeur doit transmettre à la Direccte l’accord collectif ou, en cas d’application d’un accord de branche, un document définissant les engagements spécifiques en matière d’emploi. La Direccte doit ensuite notifier sa validation de l’accord collectif ou son homologation du document pris en application d’un accord de branche, dans un délai de 15 jours (en cas d’accord collectif d’entreprise) ou de 21 jours (en cas d’accord de branche).
Le silence de la Direccte vaut acceptation tacite. Dans ce cas, l’employeur transmet une copie de la demande de validation ou d’homologation, accompagnée de son accusé de réception par l’administration, au CSE lorsqu’il existe et, si elle porte sur un accord collectif, aux organisations syndicales représentatives signataires lorsqu’elles existent.
L’employeur doit informer les salariés de la décision de la Direccte, ainsi que des voies et délais de recours.
Un décret d’application est attendu concernant le contenu de l’accord collectif, la mise en oeuvre du dispositif en application d’un accord de branche et les conditions de la majoration du montant de l’indemnité d’activité partielle ainsi que de celui de l’aide de l’État.
Dans le cadre de ce nouveau régime d’activité partielle, certaines dispositions ne sont pas applicables :
- la majoration de l’indemnité d’activité partielle versée aux salariés en cas de formation pendant la période d’activité partielle ;
- l’individualisation de l’activité partielle (art. 10 ter de l’ ordonnance n° 2020-346 du 27 mars 2020) ;
- les stipulations conventionnelles relatives à l’activité partielle, conclues avant l’entrée en vigueur de la présente loi.
Entrée en vigueur : ce nouveau régime est applicable aux accords collectifs et aux documents transmis à la Direccte jusqu’au 30 juin 2022.
c. Monétisation des jours de repos (art. 6)
Afin d’améliorer l’indemnisation des salariés placés en activité partielle n’ayant pas bénéficié d’un maintien total de leur salaire, le texte permet, à certaines conditions, la monétisation de jours de repos dans 2 cas de figure.
1er cas, l’employeur peut imposer (art. 6, I)
» à condition qu’un accord d’entreprise ou de branche le permette
» aux salariés bénéficiant du maintien intégral de leur rémunération sur le fondement de stipulations conventionnelles
» d’affecter des jours de repos à un fonds de solidarité pour être monétisés ; cette monétisation permet de compenser tout ou partie de la diminution de rémunération subie, le cas échéant, par les autres salariés placés en activité partielle.
Cette disposition pourra, par exemple, concerner la branche de la métallurgie qui prévoit un maintien total de la rémunération uniquement au bénéfice des salariés cadres. L’employeur peut ainsi, à condition qu’un accord collectif le prévoit, imposer aux cadres de céder des jours de repos qui permettront de compenser la perte de rémunération des salariés non-cadres.
2nd cas, les salariés peuvent, à leur demande :
» à condition qu’un accord collectif (d’entreprise ou de branche) le prévoit
» demander la monétisation de jours de repos pour compenser tout ou partie de la baisse de rémunération qu’ils auraient eux-mêmes subie.
Entrée en vigueur : à compter du 12 mars 2020 et jusqu’au 31 décembre 2020.
d. Prévoyance pendant l’activité partielle (art. 12)
Incidence de l’activité partielle sur la prévoyance
Concernant la prévoyance (y compris les frais de santé), il est prévu :
Le maintien des garanties de prévoyance pendant les périodes d’activité partielle ;
» quelles que soient les dispositions de l’acte de mise en place (accord collectif, décision unilatérale de l’employeur) ou du contrat liant l’employeur et l’assureur ;
» à défaut, le dispositif est privé de son caractère collectif et obligatoire nécessaire à l’application des exonérations sociales et fiscales ;
Sauf dispositions plus favorables, lorsque les garanties sont financées sur les revenus d’activité des salariés soumis aux cotisations de la sécurité sociale ou à la CSG, les indemnités d’activité partielle (non soumises aux cotisations de sécurité sociale) entrent dans l’assiette des cotisations de prévoyance ;
» La détermination d’une assiette plus favorable que la règle ci-dessus fait l’objet d’un accord collectif ou d’une décision unilatérale de l’employeur, ainsi que d’un avenant au contrat collectif d’assurance.
Entrée en vigueur : du 12 mars 2020 et jusqu’au 31 décembre 2020.
Report du paiement des cotisations
À titre exceptionnel, les employeurs bénéficient, sur demande aux organismes de prévoyance, de reports ou délais de paiement des cotisations de prévoyance concernant les salariés placés en activité partielle, sans frais ni pénalité.
Si l’employeur n’a pas payé les cotisations de prévoyance, du 12 mars au 15 juillet 2020, les organismes assureurs ne peuvent pas suspendre les garanties ou résilier le contrat à ce titre.
À l’issue de cette période, les reports ou délais de paiement ne peuvent avoir pour effet, pour les employeurs et, le cas échéant, les salariés, de payer ou précompter plus de 2 échéances, au cours d’une période au titre de laquelle le contrat prévoit le versement d’une échéance, sous réserve que les cotisations dues au titre de cette période soient versées au plus tard le 31 décembre 2020.
Entrée en vigueur : du 12 mars 2020 au 15 juillet 2020.
e. Retraite (art.11)
À titre exceptionnel, les périodes d’activité partielle comprises entre le 1er mars et le 31 décembre 2020 sont prises en compte pour l’ouverture du droit aux pensions de retraite de base prenant effet à compter du 12 mars 2020. Un décret d’application doit fixer les conditions d’application de cette mesure.
2. Intéressement (art. 18)
Par dérogations, les TPE peuvent mettre en place un accord d’intéressement par décision unilatérale (DU) à condition :
D’avoir moins de 11 salariés ;
Qu’elles ne disposent ni d’un délégué syndical, ni d’un CSE ;
Qu’aucun accord d’intéressement ne soit applicable ni n’ait été conclu dans l’entreprise depuis au moins 5 ans avant la date d’effet de sa décision.
L’intéressement peut être mis en place pour une durée de 1 à 3 ans. Les salariés doivent en être informés.
À l’issue de cette période, la reconduction de l’intéressement doit s’effectuer selon les modalités de droit commun (accord ratifié, accord collectif, etc.).
La plupart des dispositions relatives à l’épargne salariale sont applicables à celui mis en place par DU, notamment les exonérations. Les dispositions non applicables sont les suivantes : les sections 1 à 3 du chapitre Ier du Titre IV du Livre III relatif à l’épargne salariale et les articles L 3344-2, L 3344-3 et L 3345-4 du Code du travail.
Entrée en vigueur : 19 juin 2020.
3. CDD et intérim (art. 41)
Temporairement, les accords collectifs d’entreprise peuvent :
- Fixer le nombre maximal de renouvellements des CDD, sauf pour les CDD conclus dans le cadre de la politique de l’emploi ; ce nombre ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise ;
- Fixer les exceptions et les modalités du délai de carence entre deux CDD conclus sur le même poste.
Un accord d’entreprise conclu au sein de l’entreprise utilisatrice peut prévoir ce type de dispositions pour les travailleurs temporaires qu’elle accueille. Il peut également autoriser le recours à des salariés temporaires dans des cas non prévus à l’article L 1251-6 du Code du travail.
Ces dispositions conventionnelles d’entreprise prévalent sur les dispositions des accords de branche.
Entrée en vigueur : les stipulations de ces accords d’entreprise sont applicables aux contrats de travail conclus jusqu’au 31 décembre 2020.
4. Prêt de main d’oeuvre (art. 52)
Les dispositions relatives au prêt de main d’oeuvre à but non lucratif sont assouplies de manière temporaire :
- La convention conclue entre les 2 entreprises peut porter sur la mise à disposition de plusieurs salariés ;
- L’avenant au contrat de travail conclu entre le salarié mis à disposition et son employeur peut ne pas comporter les horaires d’exécution du travail. Il précise dans ce cas le volume hebdomadaire des heures de travail durant lesquelles le salarié est mis à disposition. Les horaires de travail sont fixés par l’entreprise utilisatrice avec l’accord du salarié ;
- L’information et la consultation préalables du comité social et économique peuvent être remplacées par une consultation sur les différentes conventions signées, effectuée dans le délai maximal d’un mois à compter de la signature de la convention de mise à disposition ;
- Lorsque l’intérêt de l’entreprise utilisatrice le justifie eu égard aux difficultés économiques liées à la propagation du Covid 19 et qu’elle relève de secteurs d’activités particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation et à la continuité de la vie économique et sociale déterminés par décret (à venir), les opérations de prêt de main d’oeuvre n’ont pas de but lucratif pour les entreprises utilisatrices, même lorsque le montant facturé par l’entreprise prêteuse à l’entreprise utilisatrice est inférieur aux salaires versés au salarié, aux charges sociales afférentes et aux frais professionnels remboursés à l’intéressé au titre de sa mise à disposition temporaire ou est égal à zéro.
Entrée en vigueur : du 19 juin 2020 au 31 décembre 2020.
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